Et si on partait de la définition de ce qu’est être adulte aujourd’hui pour repenser nos relations avec les jeunes et mieux les accompagner ? Une autre manière d’explorer l’intergénérationnel dans les différentes sphères de la vie sociale, dont l’entreprise.

Le modèle de l’adulte a connu de profondes transformations depuis les années 50. Jean-Pierre Boutinet (1), psychosociologue nous incite, par son analyse, à nous poser une question fondamentale : comment ces changements dans l’expérience d’être adulte et dans ses représentations influent sur le rapport que les adultes entretiennent aux jeunes ?

Boutinet incite à nous poser une question fondamentale : comment ces changements dans l’expérience d’être adulte et dans ses représentations influent sur le rapport que les adultes entretiennent aux jeunes ?

Evoquant un “adulte immature”, il se pose la question de savoir si finalement, l’âge adulte, de toutes les étapes de la vie, ne serait pas celui qui deviendrait le plus problématique !

Années 50 : l’adulte-étalon

🔍 Point de référence autour duquel les autres âges prennent sens, l’adulte incarne la norme morale et garantit la reproduction des générations. En dépit des évolutions extérieures, il maintient une stabilité apparente. Son désir d’incarner des idéaux, tels que la figure maternelle au foyer, l’ingénieur, le mâitre d’école reste constant.

Années 60 : l’adulte en perspective

🔍 Il doit faire face à l’accélération des progrès techniques et aux profonds bouleversements sociétaux. Le fossé des générations se creuse et il faut s’adapter. L’adulte ne se perçoit plus comme figé dans une maturité établie, mais comme un être en mouvement. L’adaptation aux défis de son époque et la construction de projets de carrière et de formation deviennent des éléments essentiels de son développement.

Années 75-80 : l’adulte à problèmes

🔍 A partir des années 75-80, le contexte marqué par le chômage et les crises sociales introduit un nouvel âge adulte, celui de “l’Adulte à problèmes” qui perd ses repères. Alors que les jeunes et les retraités bénéficient toujours du soutien des institutions, l’adulte se retrouve seul face à ses responsabilités. Il expérimente le sentiment d’immaturité dans un monde complexe et instable. Précarité de l’emploi, nécessité de reconversion, déstructuration de la famille traditionnelle…Chaque aspect de sa vie devient un défi à relever ! 

Ainsi, l’âge adulte se transforme pour devenir une phase de résolution continue de problèmes, de bifurcations, plutôt que de maturation prédéfinie. Boutinet évoque un adulte “sans ancrage”. C’est toute l’incertitude dans laquelle l’individu moderne évolue qu’il souligne, cette anxiété de devoir s’auto-déterminer dans un monde mouvant. 

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Etre adulte aujourd’hui demande un effort constant : il faut être responsable, anticiper l’avenir, s’adapter aux changements, et continuer à apprendre. Rien d’étonnant finalement à ce que les interactions entre adultes et jeunes soient très souvent teintés d’anxiété. 

Mais alors quel est le rôle de l’adulte ?

Dans la famille, à l’école

Dès lors, le rôle des adultes est de conduire les jeunes vers l’autonomie plutôt que de chercher à les enfermer dans un parcours linéaire, vestige d’un modèle dépassé ; Et donc de les soutenir tout au long de leur parcours, quels que soient les avancées et les retours en arrière, car les chemins vers l’âge adulte sont plus sinueux et moins prévisibles. 

Le processus d’intégration sociale ne se limite plus à la quête d’une position stable, mais englobe l’acquisition des compétences nécessaires pour s’adapter aux mutations.

Ce qui implique un nouveau paradigme pour l’éducation… Tout au long de la vie ! Prenons un exemple concret. Nous  demandons très tôt aux jeunes de se prononcer sur un projet professionnel tout en leur annonçant que la plupart des métiers de demain restent inconnus. N’est-il pas temps de sortir de ce mythe du “projet professionnel” au profit d’une éducation axée sur les compétences et la capacité “d’apprendre à apprendre” ? Ce qui nécessite d’être autonome, c’est-à-dire en capacité de se prendre en main et de faire des choix personnels éclairés.

Dans l’entreprise

L’accompagnement dans la construction de l’autonomie constitue un enjeu clé dans les relations intergénérationnelles en entreprise ou au sein des organisations. Car elle est intimement  liée à la transmission des connaissances, des compétences, ainsi que des normes et codes culturels essentiels à sa pérennité. Et cette transmission ne peut s’effectuer que dans un climat de dialogue, de confiance et de respect mutuel (2)

Accompagner l’autonomie est un levier de motivation et de fidélisation des jeunes qui aspirent à une certaine forme de liberté. Tandis que de leur côté, les managers sont en quête de collaborateurs pro-actifs et prêts à prendre des initiatives dans un contexte d’essor du travail à distance.

Mais l’autonomie est une notion ambiguë qu’il convient de définir. Elle n’exclut ni l’accompagnement ni le contrôle. De la microgestion excessive à une confusion entre autonomie et indépendance, l’expérience du travail en entreprise pour les jeunes revêt de multiples visages qu’il est instructif d’explorer et de comprendre pour adapter son management.

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Sources :

• (1) https://www.scienceshumaines.com/l-adulte-immature_fr_10638.html#
• (2) Enquête et Conférence B. Decoop 2022 “Accompagner l’autonomie des jeunesen entreprise : un enjeu intergénérationnel. Une approche sociologique pour comprendre, dialoguer et adapter son management“